jeudi 22 février 2024

"Pour Danielle"

 

"Pour Danielle"

 


 

Au milieu des blés,

Elle fut cette fée,

Dans la nature

Surgie des temps

Obscurcis…

Avec son cortège

De fantômes

Et de spectres

Mal partis…

 

Un rayon d’or,

Sorti de l’eau,

Prit possession

Avec des mots ;

Les champs, alors,

Fleurissaient,

L’air devint pur

Et nourrissait

Des éléments d’un

Monde nouveau ;

 

Un chant lointain,

Un battement d’oiseau

Se firent entendre,

Fécondant… la toile

Où ils vinrent s’étendre.

 

Charme au parfum

Ensoleillé,

Telle une écharpe

De fumée s’élevant

Des herbes brûlées

Au jardin de

Saint Julien…

 

Auprès du canal

Poussant son eau

Vers l’horizon,

Comme une main

Tend vers l’infini…

Afin de saisir

Ce moment

De bonheur promis…

 

La vie a emporté

La destinée cruelle;

Aucun cheval ne retint

Le bateau s’en allant

Vers l’avenir…

 

Les arbres ont poussé.

Les saisons sont passées,

Du printemps à l’été

Et de l’automne à l’hiver,

Le paysage a respiré,

Puis s’est courbé

Sous le poids du ciel.

Sa majesté s’est inclinée

Et le temps s’est apaisé…

 

Une douce brise

Monte des champs…

Pour se perdre entre les arbres,

Fixer la paix pour l’éternité.

 

Des toiles sont nées

Des blés dorés…

Au milieu d’un bourdonnement

D’abeilles et de miel,

Des champs féconds

Et de la terre vallonnée,

Où la douceur de vivre

Fut déjà légendaire…

 

J.E. 02/10/2014

jeudi 26 avril 2018

Palerme ou Les Roses Noires


 Palerme ou Les Roses Noire
Palermo, il giorno che la vidi per la prima volta… 

1


Palerme
Ou
Les Roses Noires

Quand tu émerges des ténèbres,
Noir, comme du sang calciné,
Au chant de tes funestes vêpres,
Tu portes haut ta bien-aimée.
2


Quand Palerme de blanc voilé,
De processions et fêtes données,
Un parfum de cierges exhale,
Les Roses Noires sont fanées.
.
Tu interpelles nos destins
De ta grandeur disparue.
Tu suis les traces
De nos ombres
Sur la lave des pas perdus.
3


Sous nos pas elle gémit,
Son reflet presque éteint
Implorant
Qu’elle bénisse,
Tous tes anges taciturnes.
4


Palerme
Dévoile ses splendeurs,
Ses folies avec sagesse.
Et ses somptueuses demeures
Ont un fond de bleu céleste.
.
Le sirocco, ce vent chaud,
Vient mourir
Dans tes cavernes.
Et impose le silence
Devant tant d’insolence.
5


Ville mystique, ville de silence,
Ville fière, ville d’opulence.
Femme divine, noblesse gantée,
Qui pèse le feu et la glace.
Qui attise ou refroidit
Tous les cœurs lancinants
Qu’elle éclaire en passant.
6


De tes palais majestueux
Se penchent des anges
Versant leurs larmes
Sur les ruines somptueuses
En extase devant Palerme.
7


Fier,
Ce cheval tire son carrosse.
Fiers,
Les capucins exhibent leurs os.
Lorsqu’ils rient, séchés, vivants,
Dans leur costume de dimanche.
8


Une vierge muette
Veille sur leur paix,
Auréolée d’un néon bleu,
Et, généreuse, bénit leurs âmes.
9


Quand les cendres de ton ombre
Ne seront plus que des décombres,
C’est elle qui guette
L’âme ébranlée
Qui ne peut s’affermir.
Et sa clameur
Monte au ciel
Où son cri se révèle !
10


Mais toi, marionnette exsangue,
Rescapée d’une histoire glorieuse,
Te mouvant par des muscles étrangers.
Pupi, dont le visage exprime,
Des facettes de rire et (de) mimes
Où le poids des siècles est passé.
.
Et toi, étranger,
visiteur impromptu,
Le cœur chauffé ou refroidi.
Juste un regard étonné,
Effrayé ou ébahi
Par tant d’étranges
Cérémonies.
11


Une tête, des seins,
Un pied, un bras,
Une main, un cœur,
Un nez cassé, une jambe en l’air.
Un visage éploré.
En argent, tout scintillant.
Le buste d’un Saint pénétré.
12


Tous,
Dansant par-là, accrochés.
On les appelle
Des ex-voto.
Déposés et entourés
De dentelles en lambeaux
Et de couronnes étonnées
Assemblées par les dévots.
13


Palerme,
ville exquise, odorante,
D’immobilité voluptueuse
Et de paresse savoureuse,
A le cœur ouvert à l’espérance.
De joie nourrie,
Au goût de sel,
Fière de sa succulence.
Et tout s’explique
Face à la mer
Où la baignade
Est interdite!
14


Quand Palerme
Choisit son éclairage
De discrétion obscure,
Elle cultive ses préférences
Amoureuses
De désir étourdissant.
Le regard des femmes
Dévoile le rôle
De leurs belles parfumeuses.
La nuit procure satisfaction
À la sensualité ludique.
Et la pudeur supposée
Reçoit de vifs démentis
Sous l’œil avide du public.
15


Une procession traverse les rues.
Rosalia bénit les cœurs,
Portée par de fières épaules,
Sous des voiles et couronnes.
Et le cri du peuple se réveille,
Halluciné, nostalgique,
Devant tant de charme mystique
.
Dans la vallée de son cœur,
Là, où les souvenirs se bousculent,
Où la flamme déjà vacille,
Où elle craint de mourir,
La voix des fidèles retentit,
Devant cette scène grandiose,
Les mythes se réveillent
Et les Saints prennent des poses.
16


De Sainte Rosalie
Et ses divins Dolci,
À la sublime Ricotta
Et au Trinfo di Gola.
Fenouil sauvage
Défroqué en pâmoison,
Regorgeant d’ivresse.
Palermitains éperdus,
Ployant sous leurs messes.
.
Visages sublimes,
Croix de roses.
Tous les maîtres réunis,
Savourant l’issue heureuse
Dans
Leur mélancolie grandiose.
17


Oh,
Santa Maria dei Naufragati
Et ses envoûtantes vêpres!
Portant haut sa couronne,
La joie au cœur
À la gloire des disparus
Et des âmes étreintes.
Naufragé ou vivant,
Son cri émerge des profondeurs
Où la mort s’évanouit dans le néant.
18


Le Trionfo della Morte
Vous accueille partout.
C’est un momento mori
Qui galope parmi la foule.
Les fleurs déposées
Sur la tombe de Fréderic II
Sont fanées depuis longtemps
En guise de bienvenue.
 19


Passe
Une mariée,
En voile, joyeuse,
Toute en dentelles,
Au visage de Madone,
Le cœur baigné
De larmes de miel.
.
Rouge est sa bouche
Au goût de fraises.
Et sur ses lèvres se dessine
Le sourire qu’un ange devine.
Il lui prête ses ailes majestueuses
Et sa face d’ange heureux.
De sa fière beauté émane
Toute la pureté de son âme.
Elle exhale la fraîcheur du bonheur.
Son cœur empli de tendresse,
Qui attend une belle messe.
20


Le blanc triomphe, le blanc ose.
Sur sa main finement sculptée,
Parfumée de belles roses,
Un chaste baiser se dépose.
Et, dans un crépitement joyeux,
Avant qu’un pétale ne tombe,
Monte l’envolée des colombes.
21


Le père, sévère, honneur oblige,
Tient la main de sa fille.
Une larme pressée orne sa paupière
Et rejoint celle de la mère.
Larmes de joie et larmes amères
Se mêlent ici à la fête,
À toutes les mains généreuses
Et graines de riz que l’on jette.
22


Volez, ma belle,
Au septième ciel,
Où la providence vous guette
À Palerme.
23


Approche,
Cagoule noire.
Montre ton visage
À la face de Palerme.
Sur ton cheval déjà rompu,
Cabres-toi,
Fier de ton rang,
Ajuste ton pas
Au noble sang!
24


Voilà Palerme en habit noir,
Quand sonne la cloche venue le soir.
Dans la blancheur de la lune,
Cerbère se réveille
Via Maqueda.
Là, où le couteau est triomphant,
La nuit, seule, est conquérante.
.
La lune dessine
Ses rancœurs dans le ciel.
La bête traquée quitte son antre,
Accueille le jour d’un œil absent,
Lève ses paupières crépusculaires
Sur les cœurs palpitants,
Noyés de feu et de sang!
25


Quand l’aile de l’ange,
Avec douceur,
Se heurte enfin au silence,
Une étoile consumée
Tombe du ciel en grand rire.
S’éteignant ici-bas.
Par le regret de son éclat.
26


Quand l’aube, enfin,
Pleine de sagesse,
Lui baise sa main tachée de sang,
Le jour implore dans sa détresse,
Le soleil qui, en grand maître, se lève,
Resplendissant en sa messe !
.

Jürgen EHRE Palermo, le 02/03/2015(23 avril 2018)