ROME…
l’éternelle
1
Le
sang afflue à ma main
Posée
sur mon cœur;
Des
images fugitives remontent à la lumière ;
« Vivre »
suffirait désormais à m’occuper
Et
assister à des spectacles manqués…
Avant
que le vent d’oubli ne souffle.
Le
soleil perce lentement le brouillard des songes,
Et
l’haleine de la terre est chaude sur ma figure.
2
Je
n’oublierai jamais
Sa tête
posée sur mon épaule,
Dans ce
bref intervalle d’un soir,
Elle
y demeure toujours…
3
Rome,
Avec la
majesté de ton nom,
Étendue
sur tes sept collines;
Univers
de pierres et glorieux chaos de ruines
D’où
émergent des palais,
De
tragiques églises,
Lieux
de mystère et de vertige.
Et de
coupoles irisées,
Des
colonnes fières et muettes,
Et des
statues aux bras
De
ruines désespérées…
Montrant
le ciel.
4
Rome,
Avec
tes monuments, tes souvenirs,
Ton
passé, tes légendes,
Tes
caveaux… et tes fêtes fleuries;
Avec
tes martyrs, tes tombes et soupirs…
Tes
morceaux de Saints
Et de
morts miraculeux.
Et ton
ciel plein d’images pieuses…
Où les
hommes et les dieux,
Terrassés,
tombent à genoux…
5
Tes
jardins luxueux où l’ange du Seigneur
Descend
dans les cœurs,
Où des
grands rosiers blancs
Jettent
la neige de ses fleurs…
Comme
le soleil marque l’ombre des cils
Sur le
visage d’une femme…
6
De
ce masque tragique coulait un mince filet d’eau,
Éclairé par
le jour mourant.
Avance
ta main;
Bouche
de la vérité, toujours la vérité…
Tu
mords sans faire du mal…
Elle te
révèle ton âme
Comme
une volonté hautaine d’arrêter le temps !
7
Des
morceaux de torse enfoncés dans la terre,
Dans
des gravats sculptés,
Et des
bustes sublimes au regard de pierre…
Dans le
vaste silence pieux
De la
solitude et de l’oubli,
Qui
résonne comme un serment,
Où l’on
n’entend plus que le bruit
De la
faux invisible du temps…
8
Où
le ciseau de l’artiste
A
dépassé le génie de l’homme,
Devant
ces effigies de Dieux… et de Déesses sacrées,
Comme
par le baiser d’amour des siècles, polies et caressées,
Et de
gouttes de larmes qui ne mouillent pas…
9
Tes
palais, noirs de vieillesse qui, de leur splendeur délabrée,
N’ont
gardé qu’un vol d’oiseau soutenant toujours en l’air un balcon disparu,
au-dessous du voltigement des lessives pendues…
10
Un
souffle les gonfle comme un voile somnolent.
Accompagnant
des âmes voguant à l’horizon…
11
Figures
tragiques, êtres de cendre et de poussière,
Dont le
corps se fond en rêves, ou est-ce… douce volupté?
Solennité
immobile et muette,
Et
grandeur de mort dans un repos pétrifié.
12
Des
colonnes isolées qui ne s’appuient plus qu’au ciel
Surgissent
des pointes d’épées
Noires
sur le ciel…
Où se
tient l’ange resplendissant aux ailes déployées…
De
ponts victorieux au milieu des dieux…
De tes
arcs de triomphe enterrés et des fosses encombrées.
13
Ville
magique, ville éternelle,
Dans sa
grandeur perdue
Et à
chaque fois retrouvée,
Quand
tombe un tintement de cloche.
À peine
bavarde…
Sous un
ciel de plomb éteint, jaune et blafard.
14
Où
les femmes sont si belles,
Amoureuses
ou rebelles,
Où
l’homme galant
Parle
aux nuages
Pour
atteindre leurs rouages ;
Où les
statues lui succombent
Dans
ses bras ouverts comme une tombe.
N’oublie
pas la beauté qu’ils t’ont donnée,
Les
dieux dans leur magnificence,
Et le
bonheur qu’ils t’ont légué…
15
Les
statues te regardent passer de toute leur chaire nue,
Dieux
et déesses en marbre, et des centaures galopent,
Emportant
sur leurs reins fumants de belles filles pâmées…
Parmi
ce triomphe de la chair,
Cette
nudité étalée, glorifiée,
Qui
clame la toute-puissance de la nature, l’éternelle matière. Impérissable !
16
À
la nuit tombée
Tu
montres tes fantômes,
Tu
feints de savoir où sied ton génie,
À
tromper tous les vivants,
À
rappeler les morts
Au
clair de lune
Dans ta
superbe supercherie.
17
Quand
se lèvent les prières
Aux
mots brûlés à rêver sur le divin,
Lentement
se réveille la volupté animale,
Où tu
souffres des branches de rosiers
Dont
les épines ensanglantent ton linge…
Terrain
mystique de songes impossibles,
Ô Ville
éternelle, cœur en larmes;
Au bout
circule un filet de sang
Montrant
le chemin au martyr, la seule issue !
18
Rome
qui s’enfonce dans ses tombeaux.
Tragique
décor de ruines et de sépultures…
Propices
à la contemplation et à la rêverie. Chaque siècle en avait renouvelé la gloire,
comme sous la sève d’une immortelle jeunesse ;
Il
régnait là une ombre, un silence, d’une grandeur morte et d’une infinie tristesse…
19
Des
fontaines coulent un nectar,
Nourrissant
les angelots,
Murmurant
des prières,
Tantôt
joyeux, tantôt en sanglots…
20
Des
façades se penchent tes héros.
Eux
seuls meurent debout…
Sous
ton œil émerveillé.
Tes
places impérieuses
Évoquent la
nostalgie…
21
De
ponts victorieux au milieu des dieux…
De tes
arcs de triomphe enterrés et des fosses encombrées
22
La
Porte de la Mort au marbre noir,
Aux
tibias envolés d’un squelette doré,
Masque
aveugle à l’image du trépas,
Dressant
en l’air,
Avec le
bout de ses phalanges d’os,
Le
sablier du Temps éternel…
Cette
terre où les martyrs dormaient de leur doux sommeil,
En
attendant le réveil glorieux…
23
Blanche
est ta lumière douloureuse,
Où les
fleurs exhalent leurs parfums dans un adieu odorant,
Où la
colère de l’homme et du ciel et l’eau se mêlent au noir de la flamme
Se
rejoignant dans un incendie et un déluge, le ciel implorant!
24
Telle
une déesse à l’ombre d’un cyprée,
Ta
silhouette se dessine et se perd dans l’immobilité
Dans ce
désert de pierres nées et jetées là pour toujours ;
Lieu
cruel où se rencontre la passion du cœur humain,
La
passion de voir mourir… et la folie de mourir…
25
Des
anges équivoques, beaux comme des belles filles.
Des
femmes désirables avec des hanches et des gorges de déesses ;
Propices
à la contemplation et à la rêverie.
Chaque
siècle en avait renouvelé la gloire,
Comme
sous la sève d’une immortelle jeunesse…
26
Tu
tiens dans la main un cœur haletant
D’où
naissent tes héros que la louve a sevrés.
Sur
leur colonne majestueuse
Immobile
dans le temps…
Hymne
poignant à la grandeur du passé
Qui
nourrit nos âmes et éclaire les profanes.
27
Des
siècles de lumières
Ressuscitent
dans tes bras,
Une
rêverie qu’emprunte
Ses
teintes romantiques…
À une
vision de joie.
30
Ville
du sacré et des cérémonies,
Couronnée
de statues nues
Qui se
pâment sous ton ciel
Dans
tes jardins mystérieux
Aux
ombrages parfumés
Et
palais orgueilleux.
31
Sous
le charme des jardins
D’où
jaillissent
Des
silhouettes tourmentées,
Où
chuchotent des rois, prisonniers
Dans
cet océan de verdure,
Au
milieu des acanthes,
De
faune et bacchantes,
Où le
cœur en bronze
Est une
torche vivante.
Dans ce
sublime décor de l’obscurité
Sous la
clarté des étoiles…
33
34
Au
coucher du soleil la ville s’embrase,
Cet
ange, en douceur sur ta gloire se penche.
Il
défend tes vestiges, apaise les douleurs,
Épris de
la poésie de tes ruines crépusculaires.
35
À
Rome repose
Un
songe transfiguré
Où les
prières se mêlent
Aux
éclats dorés…
Des
trésors
Qui lui
sont dus
Pour
l’éternité.
36
Les
semences jetées de roses sauvages
Et de
citronniers d’or au parfum pénétrant ;
Et
d’arbres majestueux qui s’arrachent de la terre
Comme
un nœud de chimères et de beaux serpents…
Au
milieu des colonnes tragiques et immortelles…
37
Blanche
est ta lumière douloureuse,
Effervescent
ton baroque,
Et
majestueux le scintillement de tes fontaines.
Où les
femmes sont si belles,
Amoureuses
ou rebelles,
Où
l’homme galant
Parle
aux nuages
Pour
atteindre leurs rouages :
Que les
statues lui succombent
Dans
ses bras ouverts comme une tombe.
N’oublie
pas la beauté qu’ils t’ont donnée,
Les
dieux dans leur magnificence,
Et le
bonheur qu’ils ont légué !
OvL 2012
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