samedi 10 novembre 2012

Exposition d'IZIS - Le Marais


Exposition d'IZIS - Le Marais

l'Hôtel de Ville de Paris, Le photographe rêvé de Paris, 75004 Paris
16.04.2010 (mis à jour le 24.04.2010)

 
 
IZIS, le PHOTOGRAPHE



Introduction

L’accès à l’exposition demande un peu de patience. Essayez de rester stoïque. (Qu’est-ce que c’est…déjà ? On l’apprend vite !). Une longue et interminable queue vous attend devant l’entrée. Vous êtes prié d’entrer par groupe d’une dizaine. Est-ce à cause de la gratuité de l’entrée ?
En attendant, vous pouvez nouer connaissance. C’est ce qui m’est arrivé, tout en patientant et plaisantant avec des gens charmants pour prendre son mal en…patience, malgré l’impatience qui nous habitait. La chance nous a souri, le temps d’attente fut court.



D’abord vous vous déshabillez, eh oui, il faut montrer patte blanche, partout maintenant. On se serait cru à l’aéroport.
Cela aurait certainement plu à Monsieur IZIS, de faire une photo de tous ces gens nus devant la porte de son exposition !
Après que votre charmante ou musculeuse silhouette fut acceptée, sondée, grillée aux rayons XXL, vous êtes enfin libre d’avancer, tout rayonnant et tremblant encore de cette imprévisible inquisition corporelle, et, vous verrez, enfin, les belles œuvres d’IZIS.



Le bonheur et le sourire vous reviennent, la matinée ne fut pas trop cruelle.
Nous sommes dans la salle d’exposition :
Avançons sur la pointe des pieds afin de ne point déranger ceux qui sont à genoux en contemplation, absorbés par la magie d’IZIS.



D’emblée, votre regard est capté. Depuis la crue lumière de la Ville de Lumière vous plongez dans l’univers feutré, noir, tamisé de l’exposition. On sait créer une ambiance aujourd’hui. Et, cela est bien nécessaire, car vous aurez besoin un certain calme autour de vous pour vous abandonner aux portraits d’IZIS qui vous fixent intensément, vous attirent, vous invitent à les approcher.
Encore un moment de bonheur, à se laisser envahir par la grande sensibilité de ce photographe à l’œil fin, inséparable de son bel appareil photographique.

Le silence s’impose tout seul à chaque fois, que l’œuvre parle (d’elle-même), est omniprésente, ne vous lâche plus, vous attire irrésistiblement. Il faut rester à l’écoute, religieusement, comme dans une prière. Votre vœu n’en sera que mieux exaucé.
Il n’est pas nécessaire de trop commenter, il faut simplement aller à la découverte, seul de préférence, seul comme le jour ou votre œil est né, lorsque qu’il s’ouvrait tout grand au monde. L’œil, l’unique organe qui nous a été donné tel quel, déjà adulte, juste l’œil qui ne grandira jamais plus. (Un œil pour les cyclopes, deux pour vous, je l’espère.) Déjà adulte pour fixer, absorber son futur, l’avenir, pour se former et embellir l’esprit…voir et être vu, pourquoi pas ? Ainsi va le monde !



J’ai été tellement impressionné, que je sentais une douce fièvre d’excitation naître en moi.
Je suis allé SEUL ! Sauf mon ombre me suivait à distance respectueuse, pour me rattraper de temps en temps, ou pour me tenir compagnie comme si souvent. Peut-être, a-t-elle pitié de moi, ou est-elle mon ange gardien, mais je ne pourrais pas vous en dire plus sur elle, sauf qu’elle est un peu gris, plutôt distante le matin et à partir de l’après-midi, à l’exception de midi quand le soleil grille mon bifteck dans mon assiette, alors là, elle est (carrément) assis sur la table..Mais, elle ne m’a jamais parlé, ni adressé la parole. A-t-elle faim ? Aime-t-elle visiter des expositions ? Difficile à deviner. Pauvre chienne d’ombre que je traîne partout, sûrement contre sa volonté. C’est une fidèle, cousue à mes talons, une inconditionnelle, et économique : elle ne mange jamais, mais surveille ma nourriture…
Donc j’étais SEUL ou presque, car c’est seulement SEUL que l’on découvre vraiment, ensuite on partage. Et j’aime partager, je suis d’une nature généreuse…un indice de trop, sûrement.
IZIS, derrière ce nom qui sonne comme un sobriquet, on découvre un regard pudique mais aigu, sachant « trouver » sa « cible » prédestinée, mot horrible mais combien contemporain.
Les images l’attendaient, car, il n’y pas de « hasard ». Dans un destin, nous paraissons être le catalyseur des nos avènements futurs…ce serait un autre débat sur le hasard autour des idées de Jacques Monod.
Revenons vite à IZIS, qui, face au « hasard », le trompe avec son œil, qui s’arrête là, avec justesse sur l’instant éphémère qui allait lui échapper pour le fixer sur la pellicule, l’immortaliser, pour nous laisser un trésor d’images à contempler, mais d’abord, bien sûr, pour se réaliser lui-même à travers de ses images ou plutôt de leur contenu, de ce qu’il y a trouvé, ce qu’il lui est essentiel, nécessaire, avec quelque chose qui lui a permis de s’identifier.
L’homme cherche la croyance en l’immortalité d’abord à travers la religion ou de l’héroïsme, puis enfin, sur le mode artistique, dans l’art notamment et en particulier dans la poésie, mais la photographie aussi est un art, c’est indubitable.. L’homme accomplit par la magie de ses actes tout ce à quoi le poussent ses désirs. Et ceci afin d’obtenir l’immortalité par la réalisation de sa pensée, que l’œuvre lui confère. Alors, il succombe à une immortalité idéologique dans son œuvre et, même si c’est un échec, par une sorte d’ironie du destin, elle le rend immortel. Est-ce que IZIS y a pensé ? Sûrement pas.

Non, c’est quelque chose (de) profondément enfoui chez l’homme, obscur, prémonitions ou pas, dont il ne détient pas toujours la clé.
Mais, toute véritable œuvre exige ce don, exige une part de vie pour le sacrifice, et l’acceptation du fait que l’artiste ou le créateur doit livrer une part de sa vie afin de lui conférer l’immortalité de son œuvre.

Ainsi naissent les chef-d’œuvres, je suppose. Ainsi, surgit l’œuvre dans une exposition (Edvard Munch, Goya, Robert Doisneau ou IZIS), car chacun a donné une part de sa vie.
Voilà, ce qui les a rendu authentiques !
Surprendre des êtres dans des attitudes «autres », souvent à leur insu. Pour cela, il faut les aimer, les approcher, afin qu’ils aient la grâce de se donner, de faire peut-être semblant de poser, de se laisser photographier, et, en respectant aussi leur dignité, s’inviter avec humilité, qui ne blesse pas, surtout quand ils s’agit
d’êtres déjà blessés !

Qui les montre dans ce qu’il y a de plus fragile, de plus dépourvu, nus, à s’exposer à la lumière, sans honte, leur misérabilisme, leur pauvreté ou leur beauté.
Et c’est le rôle du photographe de leur conserver ou re-donner toute la dignité méritée, en captant, en reconstruisant avec son regard, leur unité, leur intégrité. Saisir leurs âmes ébranlées, leur redonner confiance, afin que le miroir les reflète, leur donne l’image d’une existence digne de ce nom, dont tout être humain a besoin pour vivre.

C’est précisément ces instants que le photographe cherche « désespérément » avec bonheur à capter !IZIS, le Maître, en apprivoisant le hasard qui, agissant des fois à peine pendant une seconde, semble avoir eu la grâce du ciel, d’avoir été là, au moment précis, d’avoir su anticiper une attitude naissante, une pose inattendue, un corps impromptu.



Cela est le bonheur suprême du photographe, un bonheur inexprimable, dont seule la trace sur la pellicule (bon, numérique…alors) signe sa courte vie (comme un rayon de soleil sur le papier peint d’une chambre d’hôtel..). Fixer ces instants intenses et éphémères à jamais, en faire un trésor à partager.
Suivez son regard, et découvrez l’essentiel d’une image dont l’instant est perdu, a passé pour toujours.

C’est une expérience unique et combien émouvante, de voir une image qui appartient déjà au passé et pour laquelle nous luttons avec opiniâtreté, sinon d’une façon ou d’une passion obsessionnelle, pour la conserver, au sens du mot, car tout est appelé à disparaître, si vite, que des plus beaux moment, nous voudrions en garder une trace. J’en suis convaincu.

De lui insuffler la vie encore, et encore, jusqu’à l’essoufflement. Notre propre peur de la mort, certes, s’y exprime peut-être, car pourquoi nous tenons avec acharnement à tout vouloir conserver, faire revivre et vivre toujours, garder ce cadeau qu’est la vie aussi longtemps que possible.On dirait une vie, d’une fragilité insoupçonnée, comme une âme cristallisée, condensée dans une poupée de céramique, fragile, à la merci du doigt qui la renverse.
Merci à cet homme généreux, humble et talentueux, qui nous a gratifié d’une richesse qu’il a su créée et dont nous, les profanes, arpentant les yeux fermés notre chemin aveugle, sommes inconscients. Il nous invite à ouvrir nos yeux, ne serait-ce qu’un instant !

Tout ce que vous vouliez toujours savoir sur l’homme qu’est IZIS (de son vrai nom Izraël Biderman, né le 17 janvier 1911 en Russie, venu en 1930 à Paris, rencontre et amitié avec Prévert), vous le lirez dans les livres : « Les yeux de l’âme », « Grand bal de printemps » etc. Les livres sont faits pour retenir des dates, du solide, pour être vendus et être lus. Mes compliments à Monsieur Gutenberg.

Les émotions, ça, c’est à vous de les créer et de les ressentir. La fibre sacrée, elle se trouve en vous, pas dans les arcanes aussi savants qu’ils fussent. Nous ne voulons plus jamais retourner à l’école car la vie est la meilleure !



Merci d’avoir eu la patience de me lire jusqu à la fin, si vous y êtes arrivé. Je n’arrive pas à faire plus court, il y a tellement à voir… Merci.

Oeil von Lynx - Paris avril 2010

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